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Commission royale d'enquête sur l'avancement des arts, lettres et sciences au Canada
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ARCHIVES ET DOSSIERS PUBLIQUES*

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1.   Nous avons examiné assez minutieusement, dans la première partie, les fonctions complexes et malheureusement trop peu comprises des Archives nationales. Qu'il suffise de répéter ici que cette institution, dont les débuts remontent à 1872, a pour premier objet de garder en un même lieu, accessibles aux fonctionnaires et, - sous réserve de certaines restrictions nécessaires -, aux érudits, tous les dossiers publics et permanents de la nation qui ne sont pas conservés à titre de dossiers courants dans les ministères. Elle a un objet secondaire, dont l'importance ne cesse de s'accroître, et qui est de réunir, non seulement des copies de dossiers publics du Canada qui peuvent se trouver dans d'autres dépôts, mais aussi les originaux ou les copies de toutes sortes de documents historiques se rapportant au Canada, y compris des livres, des tableaux, des gravures et des pièces de musée.

2.   À notre sens, il importe de préciser et de réaliser plus complètement les deux fins principales auxquelles les Archives nationales ont servi par le passé. Nous sommes également d'avis que les services d'ordre historiques que les Archives peuvent rendre seraient plus aisément remplis si on abandonnait une partie des initiatives actuelles à une autre institution afin de libérer le personel et le local pour le travail d'archives proprement dit.

La garde et le soin des dossiers publics.

3.   Depuis un demi-siècle, le gouvernement fédéral entretient l'intention bien nette de réunir en un même lieu tous les dossiers publics définitivement classés. Ces dossiers y seraient conservés de façon appropriée, ils seraient accessibles aux fonctionnaires compétents, ainsi qu'aux historiens dans la mesure où l'intérêt public le permet. Cependant on n'a jamais pleinement donné suite à cette intention. Depuis 1945, un Comité des documents publics est chargé d'autoriser la destruction de dossiers inutiles, et les ministères peuvent lui demander la permission de remettre aux Archives ceux dont il importe d'assurer la conservation. Nous ne sommes pas convaincus, toutefois, que le décret du Conseil privé qui a servi à établir ce Comité des documents publics ni que les instructions administratives subséquentes soient assez explicites, ou appliqués suffisamment, dans la pratique, pour atteindre les fins qu'on avait en vue, c'est-à-dire, la conservation appropriée ainsi que l'accessibilité des dossiers publics ayant

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une valeur permanente, et la destruction des dossiers désuets et inutiles qui encombrent maintenant les bureaux de tous les départements de l'administration.

4.   Nous reproduisons en appendice(1) le décret du Conseil privé ainsi qu'un mémoire administratif traitant des mesures à prendre pour disposer des dossiers publics. Nous constatons que les ministères sont autorisés à détruire certains genres de dossiers sans importance, conformément aux dispositions d'un procès-verbal du Conseil du Trésor remontant à 1936, lequel, ainsi que ses modificatifs, permet de détruire des documents déterminés sans qu'il soit besoin de consulter le Comité des documents publics ni le Conseil du Trésor. Quant aux autres documents qui ne sauraient être détruits que sur l'autorisation du Conseil du Trésor, nous constatons que les instructions autorisant ce Conseil à permettre la destruction ne mentionnent aucunement la nécessité de consulter au préalable le Comité des documents publics, nécessité que semble comporter le décret du Conseil privé. En outre, le décret, tout en chargeant les fonctionnaires des ministères de « faire un examen périodique de l'état des pièces d'archives des ministères et de les reclassifier en vue d'en disposer ou de les transférer » semble incomplet en ce qu'il ne rend pas obligatoires l'action immédiate et les examens successifs à des intervalles prescrits. Enfin, le même décret ne mentionne pas la nécessité d'assurer au secrétaire du Comité des documents publics un personnel expert qui lui permettrait d'examiner et de signaler avec précision les dossiers dont on recommande la destruction ou le transport aux Archives nationales.

5.   Nous nous sommes efforcés de découvrir la coutume maintenant suivie dans certains ministères et nous avons été forcés de conclure que le régime actuel n'offre pas une complète sécurité aux pièces ayant une grande valeur historique. Dans les bureaux où les hauts fonctionnaires sont accablés d'autres tâches, on confie parfois la destruction, considérée comme affaire de routine, à un employé subalterne qui peut agir indûment à sa guise.

6.   Il faudrait prendre des mesures immédiates à l'égard de tous les dossiers publics définitivement classés. À cause du manque de personnel expérimenté et responsable, pourvu de loisirs suffisants pour se consacrer à ce travail important, on ne fait pas autre chose dans certains ministères que d'expédier ces dossiers vaille que vaille à l'entrepôt, quand on ne les détruit pas tout simplement d'une façon plus ou moins clandestine. En outre, ainsi que nous l'avons noté, des masses de documents utilisables, mais actuellement inaccessibles, sont exposés au feu et à un certain nombre d'autres risques. Tous les dossiers devraient être constamment examinés et quand certains sont classés définitivement, il faudrait les envoyer méthodiquement aux Archives nationales, en tenant compte, au besoin, des restrictions que le ministère imposerait conformément à l'intérêt public, et auxquelles se plierait l'archiviste du Dominion.

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7.   Nous avons découvert un problème particulier. Dans plusieurs ministères, les vieux documents, rédigés dans des circonstances bien différentes de celles d'aujourd'hui, sont classés d'après des modes que seul peut comprendre facilement un archiviste compétent et au courant de l'histoire du Canada. Ces dossiers, dont plusieurs peuvent paraître incomplets ou même fragmentaires, ont souvent une grande valeur historique. On ne saurait cependant exiger d'un préposé aux archives ministérielles, si versé soit-il dans les méthodes actuelles de la sciences des archives, qu'il les juge ou les classe avec exactitude. Ils exigent un traitement spécial.

En conséquence nous recommandons:

a) Que le règlement concernant les mesures à prendre pour disposer des documents publics soit revisé et précisé afin que les ministères puissent comprendre plus nettement les limites de leur autorité: et que soient plus nettement définies les fonctions exactes du Comité des documents publics.
 
b) Que des dispositions soient arrêtées en vue de la remise méthodique et continue aux Archives nationales des dossiers définitivement classés de tous les ministères et organismes de l'État.
 
c) Que le Comité des documents publics soit chargé de surveiller l'exécution de ce programme de transfert; qu'il soit requis de faire rapport chaque année, au gouverneur en conseil, du progrès réalisé à cet égard; et qu'il lui soit fourni un secrétaire à emploi régulier, attaché de préférence au personnel du Conseil privé, pour lui permettre de s'acquitter de ses fonctions.
 
d) Qu'aucun document ne soit détruit sans l'autorisation du Comité des documents publics; que le Conseil du Trésor s'assure de l'approbation préalable du Comité avant d'autoriser aucune destruction; et que, le plus tôt possible, le Conseil du Trésor s'entende avec le Comité des documents publics afin de s'assurer que les procès verbaux du Conseil du Trésor relatifs à ce sujet ne sont pas de nature à entraîner la destruction de pièces possédant une valeur historique.
 
e) Que chaque ministère nomme un préposé compétent aux documents, qui sera chargé de veiller, dans le cadre du règlement établi par le Comité des documents publics, à la garde des dossiers du ministère, ainsi qu'à l'examen des dossiers définitivement classés et à la remise aux Archives de ceux qui ont une valeur permanente.
 
f) Que chaque ministère et organisme fasse immédiatement la revue de ses dossiers, de concert avec l'archiviste du Dominion et remettre aux Archives ceux qui, possédant un intérêt historique, sont restés relativement inactifs depuis dix ans (ou moins, si le ministère n'en a plus besoin) et que le ministère ne considère plus comme nécessaires à ses aflaires courantes, et que chaque ministère demande au Comité des documents publics l'autorisation de détruire ceux de ses dossiers définitivement classés qui n'ont aucun intérêt historique.

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g) Que chaque ministère et organisme fasse l'examen périodique de ses dossiers, en vue de la remise régulière aux Archives ou de la destruction, des dossiers classés définitivement depuis dix ans.
 
h) Que chaque ministère et organisme soit invité à faire la distinction entre ses dossiers classés d'après des méthodes en usage, et ceux qui sont classés selon des méthodes désuètes ou que ne comprennent pas facilement les fonctionnaires du ministère; que les dossiers de cette dernière catégorie soient soumis à l'examen de membres compétents du personnel des Archives; que ceux qui ont une importance historique soient remis aux Archives, et que les autres soient soumis au Comité des documents publics en vue d'obtenir l'autorisation de les détruire.
 
i) Que l'archiviste soit autorisé à accepter, en vue de leur conservation, les dossiers possédant, à son avis, une importance nationale permanente, et à en assujétir l'utilisation aux restrictions que demandera le ministère intéressé et que l'archiviste estimera raisonnables; et que, s'il juge déraisonnables les restrictions demandées par un ministère, il ait la faculté de refuser les dossiers, que le ministère devra alors conserver.
 
j) Que toute question relative à la remise de dossiers au sujet desquels l'archiviste et un ministère ne pourraient s'entendre soit soumise au Comité des documents publics.

8.   La nécessité où sont les historiens de consulter les archives pour faire un travail de première main donne une importance particulière, à nos yeux, à la politique adoptée par l'État pour ce qui est de la consultation des documents conservés aux Archives nationales. La pratique varie beaucoup, d'une nation à l'autre, à ce sujet. De façon générale, les pays européens sont plus conservateurs que ceux du nouveau monde. Le Canada, avec raison sans doute, a adopté une attitude empirique en ce domaine et n'a pas établi de date rigoureuse et généralement applicable avant laquelle l'accès aux pièces ne serait pas permis.

9.   Compte tenu des exigences de la sécurité nationale, la Commission estime que l'intérêt public bien entendu s'accommode d'une ligne de conduite libérale pour ce qui est de la consultation des dossiers officiels par les historiens. La libre recherche de la vérité par les érudits et les savants constitue une particularité fort importante de notre régime démocratique. Il est du devoir de l'État de respecter cette tradition. S'il n'a pas la possibilité entière de consulter les archives contemporaines de la nation, l'historien ne saurait rendre à notre société et à notre culture les services supérieurs qu'on attend de lui. Nous ne présentons pas de recommandation en bonne et due forme sur ce sujet mais nous sommes d'avis qu'il ne faut pas fixer de délai trop rigide à la recherche dans les dossiers publics et que, restant subordonné à la sécurité nationale et aux obligations internationales du Canada, l'accès le plus libre soit accordé aux hommes d'étude, en particulier à ceux qui ont une compétence particulière pour la recherche et pour la publication de travaux historiques.

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10.   Il nous paraît possible d'établir une distinction entre l'accès accordé au grand public et celui qu'on accorderait aux personnes qualifiées qui se consacrent à l'étude de l'histoire et des affaires publiques. Nous considérons qu'il serait conforme à l'intérêt public que les ministères soient laissés assez libres de juger de la mesure où il convient de faciliter les recherches de ce dernier groupe de personnes. Le savant devrait jouir de toutes les facilités et de toute l'aide possible. Il pourra de la sorte donner toute sa mesure dans la tâche toujours actuelle de renseigner la population et dans le jeu ininterrompu de la libre discussion publique, traditions essentielles en bonne démocratie.

Les Archives nationales du Canada.

11.  On ne saurait donner suite à nos recommandations relatives aux dossiers publics tant que les Archives n'auront pas l'espace et le personnel suffisants. Nous avons appris qu'il est maintenant relativement aisé de trouver des personnes possédant la formation nécessaire au travail d'archives. L'archiviste du Dominion, nous l'avons noté, examine présentement le genre de formation professionnelle qui s'impose. Sauf erreur, on élabore un programme méthodique qui sera réalisé quand les circonstances le permettront. Il est évident qu'il faudra un personnel beaucoup plus nombreux, compétent et expérimenté pour disposer de façon appropriée de la masse de documents qui devraient être remis aux Archives, ainsi que pour assurer un service convenable aussi bien aux ministères qui les utiliseront encore dans une large mesure qu'aux chercheurs qui les réclament depuis si longtemps. En outre, si les Archives doivent maintenir et même accroître leur activité en tant que centre historique, il leur faudra augmenter leur personnel formé à cette fin.

12.  Avant d'augmenter le personnel des Archives, toutefois, il y aurait lieu d'examiner les aptitudes et les fonctions du personnel actuel. Nous ne croyons pas de notre devoir de présenter des recommandations détaillées à ce sujet. Nous retenons seulement que, sur plus de trente personnes, apparemment occupées maintenant au travail professionnel d'archives, moins de la moitié possèdent une instruction dépassant le niveau primaire supérieur. En outre, il semble qu'un compartimentage rigide se soit installé peu à peu aux Archives, et que ce compartimentage ne favorise ni le rendement ni l'économie. Il n'est ni possible ni utile de chercher à attribuer à certaines personnes en particulier la responsabilité d'une situation déplorable dont l'origine remonte à de nombreuses années, c'est-à-dire à une époque où l'on ne se rendait pas encore pleinement compte de la nature et de l'importance du travail des archives en notre pays. Nous comprenons parfaitement qu'il est difficile de réaliser des réformes sans que le poids n'en retombe sur quelques fonctionnaires qui ont servi consciencieusement dans la mesure de leurs capacités. Toutefois, nous estimons que l'intérêt de cette importante institution nationale

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exige une réorganisation du personnel, préliminaire essentiel au développement général qui doit se produire si l'on veut que les Archives remplissent les fonctions qui leur reviennent.

En conséquence nous recommandons:

k) Que l'archiviste du Dominion reçoive instructions de recommander une nouvelle répartition des divisions des Archives ainsi que des fonctions du personnel comme il jugera nécessaire au rendement et à l'économie et que les personnes dénuées d'aptitudes pour le travail d'archives soient placées dans d'autres services.
 
l) Que l'effectif actuel du personnel des Archives soit accru grâce à l'engagement de personnes compétentes; qu'on s'efforce de recruter un certain nombre d'employés sérieux et hautement compétents pour aider au travail qu'exigent les documents publics et autres manuscrits ayant une importance historique; que l'on continue la pratique actuelle de n'engager pour les fonctions d'ordre professionnel que des personnes possédant une formation historique suffisante et que l'archiviste soit invité à indiquer avec précision le minimum d'aptitudes requis pour les divers postes professionnels des Archives.

13.   Il n'y a aucun doute, d'autre part, que les locaux des Archives, même s'il y a lieu de transporter ailleurs certaines collections qui y sont conservées, sont manifestement insuffisants. D'aucuns ont exprimé le souhait que le bâtiment actuel, qui ne donne pas entière satisfaction dans le détail, serve à d'autres fins et qu'on en construise un autre pour les Archives. Nous ne sommes pas convaincus qu'il s'agisse là d'un problème urgent. L'édifice des Archives est solidement bâti, presque complètement réfractaire au feu et muni d'un bon appareil avertisseur d'incendie. Si on n'y recevait que les documents et les livres nécessaires, cette réforme fournirait pas mal d'espace disponible. En outre, si nous ne nous abusons, il existe déjà des plans en vue d'un rajout considérable.

En conséquence nous recommandons:

m) Que les mesures qui s'imposent soient prises immédiatement pour que l'édifice actuel des Archives serve uniquement aux collections de documents et à une bibliothèque de travail; et qu'on agrandisse le bâtiment comme il convient.

14.   On admet généralement que les Archives nationales rendent un service incalculable grâce à la collection qu'on y fait de copies de documents publics et de matériel historique venant de pays étrangers, ainsi que de pièces de toutes sortes recueillies au Canada. Ce travail ne doit souffrir aucune interruption et il ne doit pas se poursuivre à l'écart de celui qu'exigent la réunion et la garde des documents publics. Les deux fonctions doivent être menées de front et prendre de l'expansion parallèlement si l'on veut que les Archives continuent à fournir à l'avenir les services très louables qu'elles ont rendus par le passé à la science historique au Canada.

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15.   L'adoption d'une ligne de conduite plus large et plus énergique quant à l'acquisition de tous les matériaux relatifs à l'histoire du Canada est d'une urgence particulière, en un temps où la crise du logement, les changements fréquents de domiciles et l'insécurité générale des conditions de vie portent les gens à se défaire de leurs biens de famille, notamment de pièces d'archives. Nous croyons donc important qu'on institue un relevé général des matériaux historiques et que l'on augmente les acquisitions en conséquence. Pour l'exécution de ce travail, il y a lieu de procéder avec le plus d'économie et d'efficacité possibles grâce à l'emploi du microfilm, ainsi que la chose se produit déjà dans les bureaux de Londres et de Paris de nos Archives nationales. À ce sujet, on nous informe qu'il suffirait chaque année d'une somme supplémentaire très minime pour décupler, au moyen du microfilm, le nombre de transcriptions obtenues par l'intermédiaire de ces bureaux.

16.   Nous avons parlé, dans la première partie, des pertes sérieuses occasionnées par la répugnance de plusieurs personnes, surtout celles qui ont participé activement à la vie publique, à donner ou vendre leurs papiers à une institution officielle, par crainte d'interprétations erronées, involontaires ou voulues, de la part de gens irresponsables. Nous croyons qu'il faut rassurer ces personnes au moyen d'une législation appropriée.

En conséquence nous recommandons:

n) Que l'on donne à l'archiviste du Dominion les ressources nécessaires pour continuer la nouvelle pratique de transcription sur microfilm à Londres et à Paris.
 
o) Que, par l'intermédiaire d'une Commission des manuscrits historiques ou par un autre moyen, des mesures soient prises en vue de découvrir et de cataloguer toutes les collections importantes de pièces historiques relatives au Canada, à l'exception des collections biens connues et de notoriété publique se trouvant dans les bibliothèques ou les archives organisées; qu'on s'efforce d'obtenir, pour les Archives nationales ou pour une autre institution appropriée, les collections qui ne sont pas maintenant accessibles aux chercheurs, en particulier celles qui sont gardées dans des conditions où elles sont exposées à la destruction, à la perte ou l'avarie; et que les sommes nécessaires soient affectées à ces fins.
 
p) Que l'archiviste soit autorisé à recevoir des documents, sous réserve des restrictions, quant à leur utilisation, que les possesseurs peuvent proposer et qu'il juge lui-même raisonnables; et que des mesures législatives soient présentées en vue d'accorder à ces restrictions toute l'application compatible avec la constitution.

17.   Nous avons mentionné, dans la première partie, le rôle important des archives provinciales et locales qui ont la garde de matériaux intéressant l'histoire du Canada. Le relevé, auquel se livrerait une commission des manuscrits historiques ou un organisme similaire, aboutirait aux

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meilleurs résultats s'il était entrepris en collaboration étroite avec les archives provinciales, qui seraient tenues au courant et même consultées au sujet des acquisitions que feraient les Archives nationales à la suite d'une telle enquête. Une seule institution ne saurait posséder une collection originale et complète des matériaux historiques intéressant le Canada, et il ne serait pas utile que les Archives nationales achètent indifféremment tous les documents touchant immédiatement à notre histoire nationale. Les Archives nationales doivent s'en tenir à ce principe que les documents dont on peut faire l'acquisition doivent aller au centre où ils seront le plus utilisés, surtout s'il s'agit de pièces qui présentent un intérêt particulier pour une institution provinciale. Il peut exister des collections auxquelles plus d'un organisme porte un intérêt considérable et légitime, mais il ne devrait exister aucune difficulté pour arriver à un compromis acceptable. L'emploi de copies au microfilm peut servir à résoudre la plupart des problèmes.

En conséquence nous recommandons:

q) Que, en vue de l'enquête projetée sur les manuscrits historiques, les archives provinciales soient invitées à donner leur collaboration et leur aide actives; et que, pour élaborer une ligne de conduite en vue de l'acquisition de pièces, les autorités fédérales songent d'abord à des mesures tendant à la sauvegarde des documents et, ensuite, à leur dépôt dans l'institution où ils seront le plus utilisés.

18.   Nous avons reçu instructions de présenter des recommandations au sujet de la manière dont les Archives nationales peuvent accroître les services qu'elles rendent aux sociétés bénévoles et au public en général. Ces services doivent s'accroître naturellement par suite de la situation qu'occupent les Archives à titre de dépôt le plus considérable de matériaux historiques canadiens au Canada et même au monde. Cet état de choses en a déjà fait le lieu de rendez-vous des historiens canadiens, dont certains ont fait partie de son personnel. Par le passé, les Archives ont rendu d'importants services au public, par suite des ressources mises à la disposition des historiens et des chercheurs, et parce qu'elles ont facilité la connaissance de l'histoire grâce a une série d'importantes publications. Depuis quelques années, les diverses formes de cette activité se sont ralenties à cause du manque de personnel et de fonds. Il faudrait non seulement les reprendre mais leur donner plus d'ampleur, surtout grâce au microfilm et aux bandes de projections.

En conséquence nous recommandons:

r) Que le service restreint de copie au microfilm existant aux Archives nationales prenne une ampleur suffisante pour offrir, à un prix raisonnable, des copies au microfilm de pièces d'archives aux institutions et aux personnes intéressées, notamment aux archives provinciales; et que les fonds nécessaires soient affectés à cette fin.

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s) Que les Archives réalisent le plan de publications indiqué par l'archiviste dans son dernier rapport; et que l'archiviste et son personnel considèrent comme une de leurs fonctions importantes l'aide aux études historiques par ce moyen.
 
t) Que les Archives continuent à collaborer avec l'Office national du film pour produire des bandes de projections à l'intention des écoles et d'autres institutions; et que cette collaboration s'étende à la production de films historiques.
 
u) Que, afin d'aider à maintenir une collaboration personnelle étroite entre les Archives nationales et les archives locales et de faire en sorte que les Archives rendent aux chercheurs tous les services qui sont compatibles avec leur fonction principale de dépôt des dossiers publics, soit créé un Conseil d'administration qui aidera et conseillera l'archiviste pour la réunion et la conservation de toutes les pièces historiques autres que les dossiers publics; que la Canadian Historical Association soit représentée dans ce Conseil; et qu'au moins deux archivistes provinciaux soient invités à faire partie de ce Conseil.

19.   Jusqu'ici, nous avons traité des fonctions des Archives nationales à titre de dépôt de dossiers publics ou de collections d'autres manuscrits d'intérêt historique, et aussi de centre d'études sur l'histoire du Canada. Nous avons recommandé que ces formes diverses de leur activité, non seulement continuent mais se développent, et qu'on leur accorde un local, un personnel et des fonds suffisants à cette fin.

20.   Nous devons considérer également les mesures à prendre pour la conservation appropriée des richesses autres que les manuscrits d'ordre historique que peut contenir cette institution. Nous avons indiqué, dans la première partie, les collections précieuses et variées de cartes, livres, brochures, journaux, gravures, tableaux et autres pièces historiques des Archives. Nous doutons que ces collections doivent rester aux Archives. Nous pensons, ainsi que nous le disons à la première partie, qu'il importe de réunir ces collections historiques aux autres collections semblables existant dans la capitale, par exemple celles du Musée de la guerre, pour en faire le noyau d'un Musée historique canadien. Cette mesure libérerait aux Archives, un espace qui pourrait servir aux documents déposés à l'heure actuelle dans des bâtiments inappropriés et qu'elles doivent refuser faute de place. Il peut être utile que le chercheur, en même temps qu'il consulte les documents, voie les pièces et tableaux historiques qui s'y rapportent, mais ce n'est pas essentiel. Ce matériel accessoire occupe maintenant un espace précieux dans un édifice destiné à la conservation de manuscrits. Tout en regrettant que les Archives nationales soient privées de ces pièces pittoresques qui stimulent l'imagination, nous sommes d'avis que ces collections rendraient de plus grands services à la nation dans un Musée historique national. On pourrait les y disposer et exposer de façon plus avantageuse, espère-t-on. À l'heure actuelle, aucune personne spécialisée à cette fin n'est chargée de leur soin et de leur disposition.

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21.  On nous a exposé que les autres collections des Archives devraient rester réunies, que les documents ne sauraient être séparés des cartes, des journaux ou des livres, et que le meilleur moyen d'éviter la séparation serait de fusionner les Archives nationales et la future Bibliothèque nationale. Nous avons examiné avec soin ce difficile problème. Or, nous avons constaté qu'il y a désaccord parmi les personnes le mieux renseignées et le plus intéressées à l'avenir de ces deux institutions. Nous avons déjà exprimé l'avis qu'une collection mixte de dossiers publics et de certains autres documents historiques a admirablement servi aux besoins du pays par le passé et qu'on ne devrait pas modifier cet état de choses. La collection de cartes devrait certes rester aux Archives; à l'origine, nombre de ces cartes faisaient partie de documents dont elles ont été extraites aux fins de conservation. Il faut également aux Archives une bibliothèque de documentation convenable, à l'intention des chercheurs: la bibliothèque actuelle y a été d'un grand secours aux érudits. Nous pensons donc qu'il importe de garder aux Archives les documents, les cartes et les livres que l'archiviste juge nécessaires. On pourrait peut-être transporter à la Bibliothèque nationale les collections de journaux et certaines autres pièces imprimées.

22.   Nous ne croyons pas, toutefois, que même le problème délicat que posera la répartition des collections suffise à motiver la fusion de deux institutions nettement différentes par leur nature et leurs fonctions. Les Archives constituent, avant tout, un dépôt de manuscrits; la Bibliothèque sera un dépôt de documents imprimés. Les méthodes de traitement, de classement et de disposition doivent différer. Par-dessus tout, les fonctions des Archives et de la Bibliothèque diffèrent. L'archiviste est un gardien nanti d'une responsabilité directe envers le gouvernement, qui lui confie la garde de ses dossiers; il a une responsabilité indirecte envers l'érudit, et une autre encore à l'égard de la postérité. Le matériel courant dont dispose le bibliothécaire est, pour une bonne part, renouvelable. Il a le devoir d'en faciliter la circulation, il doit se préoccuper à un moindre degré de la conservation. Le premier devoir des Archives est d'assurer la sauvegarde de leur matériel; celui de la Bibliothèque, de faciliter l'accès à son matériel.

23.   D'autres considérations entrent en jeu. Il est bon que l'archiviste soit un historien. Pour le bibliothécaire, cette qualité n'est pas nécessaire; elle est même nuisible, si l'on songe à la diversité des intérêts et aux connaissances spécialisées qu'il doit posséder. De plus, à l'avenir, les deux institutions auront une telle importance que chacune devra retenir les services, à temps continu, d'un spécialiste éminent et compétent.

24.   Cependant, l'archiviste actuel du Dominion, historien éminent, est également bibliothécaire expérimenté. On lui a confié l'importante tâche de présider à la formation du nouveau Centre bibliographique dans la pé-

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riode initiale. Il ne conviendrait guère, pensons-nous, de briser le lien qui, grâce à lui, unit le Centre et les Archives; mais nous ne pensons pas que cette coïncidence d'ordre personnel doive devenir de tradition.

En conséquence nous recommandons:

v) Que les pièces de musée historique, les tableaux et les gravures soient transportés hors du local des Archives pour être réunis à d'autres collections historiques nationales dans le Musée historique canadien dont nous proposons la création; que, lorsque sera établie la Bibliothèque nationale, la collection de journaux et autres pièces soient transportées; et que la place devenue libre, de même que le rajout que nous avons déjà recommandé, serve à recevoir les pièces acquises pour ajouter aux collections de documents.
 
w) Que, finalement, la Bibliothèque nationale et les Archives nationales se développent indépendamment l'une de l'autre sous la direction de chefs distincts, mais travaillant dans l'étroite collaboration qu'exigent leurs fonctions connexes.

*Extrait de : Canada. Commission royale d'enquête sur l'avancement des arts, lettres et sciences au Canada. Rapport. Ottawa : Imprimeur du roi, 1951. Reproduit avec la permission du Bureau du Conseil privé.

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